En effet, je suis passé à la concession BMW du coin qui présentait en vitrine une superbe S 1000 RR noire à la vente. Le commercial m'a dit que cette moto était réservée à un possible acheteur, mais que ce dernier n'était pas certain de la prendre...
Ayant rappelé, j'ai eu la surprise d'apprendre que cet acheteur s'étant finalement décidé pour une Suz GSX-R, la S 1000 RR était dispo à l'essai ; j'ai donc pris rendez-vous pour.
Le jour J, je me présente, remplis les papiers d'usage et me prépare à l'essayer, précédé du commercial puisque "celle là, on laisse pas les gens partir seuls avec". Il me la sort (la moto bande de dégoutants !), je la mets en route et la laisse chauffer, en en profitant pour la détailler.
Que dire ? Elle est ramassée, petite pour une 1000 cm3, racée, et les différences de carénages interpellent et intriguent. Mais ça me plait. De plus, et comme toujours chez BMW, la finition est parfaite, même si je trouve que les caches plastiques du réservoir font un peu cheap...
Bras oscillant de dingue, bulle "pour décorer", ça respire la sportivité à outrance. Sauf que le bruit qui sort de l'échappement est tout sauf sportif ! Toujours ce feulement propre aux motos de la marque. Vraiment trop discret pour ce genre de machine.
Pour le reste, les fans de la marque pourront être un brin déçus, vu que pour récupérer une partie de la clientèle japonaise, BMW a fait des concessions sur ce qui faisait ses spécificités :
- moteur 4 cylindres en lignes
- commodos avec clignotants "normaux"
- suspensions "normales"
Je prends place et trouve mes marques de suite. Mais mon Dieu qu'elle est petite !!! Sans être aussi ramassée qu'une R6 par exemple, elle a vraiment un gabarit de 600. Les bracelets sont proches, ce qui évite d'avoir les bras tendus à outrance, et du coup, on n'est pas trop en appui sur les poignets.
Les repose-pieds sont idéalement placés. On sent vraiment que les ingénieurs ont passé du temps à tout penser pour qu'il n'y est aucun raté. Le tableau de bord par exemple est complet : trips partiels, rapport engagé, chrono, etc... Je commence à me demander si cette machine n'est pas exclusivement destinée à la piste ! J'ai beau rouler au quotidien sur mon R1, son gabarit me permet quand même d'envisager de longs trips sur route. Mais cette S 1000 RR ne parait pas du tout adaptée au bitume de nos villes et de nos routes. Encore un exemple : les pneus sont des je-sais-plus-quoi de chez -je-sais-plus-qui (je vous dirai), mais sont limites slicks ! Un minimum de sculptures pour un maximum d'adhérence !
Ca y est, on se met en route. Au fait, cette machine d'essai dispose de l'ABS déconnectable, et d'un shifter ; ce qui augmente ostensiblement la facture en passant la barre des 17 000 €... Elle est par ailleurs volontairement bridée à 9000 trs/mn par le concessionnaire pour le rodage et pour les essais.
Prise d'embrayage, passage de la 1ère et zou.
La position se confirme : je suis ramassé malgré mon p'tit 1m70. Toutes les commandes tombent parfaitement sous les pouces. Tout n'est que douceur d'ailleurs. En prenant le 1er rond-point à la suite du commercial sur son GS, je me remémore tout ce que j'ai pu lire sur cette hypersport depuis qu'elle est sortie, surtout dans ma bible Moto & Motards. Et je commence à me demander ce qu'ils ont pu fumer...
En effet, comme à chaque fois que j'ai roulé une BMW, je ne ressens rien : pas un frisson d'excitation, pas d'adrénaline, rien. C'est quoi ce bordel ?!!
Une petit peu de voie rapide et de ronds-points, direction des petites départementales. Tout est du velours, un vrai tapis-volant. Mais on avance sans aucune vibration, presque sans bruit. Par contre, le shifter, ça, ça m'éclate ! Ce petit bout de technologie est tout simplement génial, même s'il tient du gadget sur route. Un petit rappel pour les ceusses qui sauraient pas ce que c'est : un shifter est un système qui permet de passer les rapports à la volée, sans lâcher l'accelérateur, en faisant une coupure d'allumage - débrayage - passage de rapport - embrayage, le tout en quelque micros secondes. C'est bluffant et très amusant.
Pour le reste, et c'est ce qui m'énerve le plus : on en revient à ce que je disais plus haut, je m'emmerde. Parce qu'en plus du reste, le moteur est tellement creux sous 5000 trs/min que le commercial en trail me met un vent à chaque accelération, ce qui est quand même un comble ! Vous l'aurez compris : je déchante.
Nous v'là sur des p'tites départementales bosselées qui tournent. Là, son petit gabarit, sa rigidité et son train avant parfait permet de la placer où on veut sans soucis. De plus, le freinage est plus qu'excellent, tout comme la garde au sol. Et puis, toujours grâce à ces pneus de ouf, comme disent les d'jeuns, je suis littéralement collé à la route. Mais dommage que les relances soient si fastidieuses à bas régime...
Chemin du retour par une nationale. Manifestement, le commercial a décidé d'envoyer un peu

Il déboite une voiture puis se rabat. Je décide faire la même chose, et je visse la poignée pour être certain que ma machine puisse faire ce dépassement le plus rapidement possible. Et alors que je suis exactement à côté de la voiture, le régime moteur dépasse les 5500 trs/min et je me prends un de ces coup de pied au cul ! Le moteur s'emballe, la vitesse augmente d'un coup, je me rabats et, du coup, doit me jeter sur le frein pour ne pas me manger la roue arrière de mon "marshall" du jour !
C'est quoi ce truc !!! C'est Docteur Jekyll et Mister Hyde cette moto ou quoi ?!! Alors comme ça, faut rouler au delà de 6000 trs pour que ça envoie ? OK, let's do it ! Et là mes enfants, je change de dimension ! Chaque accelération est subsonique et le paysage défile comme avec le Tonnerre Mécanique : le décor s'allonge. Et ce qui est est cool, c'est que grâce à l'ABS, je me permets de faire des freinages de trappeur sans arrière pensée. Je m'amuse à enchainer accelérations - freinages en essayant de repousser gentiment les limites. Sauf que sur cette machine d'essai, je le rappelle, le régime moteur est bridé à 9000 trs/min ; frustrant...
Nous rentrons gentiment à la concession dans la circulation, où ma S 1000 RR redevient alors limite une petite mémère... Je gare "mamie", remercie le commercial, et m'allume une cibiche afin de laisser libre court à mes pensées sur la bête.
Je ne sais qu'en penser... En fait, j'ai l'impression de retrouver la Yamaha R6 : pensée pour la course, avec tout en haut du compte-tour. Bluffante d'efficacité, flirtant avec la perfection. sauf que la BMW manque de coffre à bas-régime, dommage pour une 1000 cm3, et que le bruit à l'échappement ne rend pas justice à la puissance du moteur.
Encore une fois, la finition est presque irréprochable, et tous les composants suspensions - freins - pneus sortent des usines des meilleurs manufacturiers.
Cette moto est surement la meilleure hypersportive, mais sur circuit ! Sur route, c'est une autre limonade comme on dit. Le moteur a été manifestement été conçu pour que l'on tire sa quintessence au delà de 6000trs/min, régime que, mine de rien, on atteint rarement dans la vie de tous les jours...
Je remonte donc sur mon R1, qui est plus gros, plus lourd et qui freine moins bien. Mais au moins, quand je tourne la poignée droite, ça pousse grave de suite, ha ha ha !!!
