Oui et non...
Pour info, c'est aussi mon domaine, je bosse dans l'électronique sur des circuits de power management, donc toutes les histoires de charge/décharge de batterie, courant et régulation de tension, je maîtrise.
Et je peux t'assurer que tu fais erreur sur plusieurs points, dont les courants en jeu lorsqu'on shunte deux batteries différentes.
Exemple avec les piles, si on interdit de mettre des piles déchargées en parallèle avec des piles chargées ce n'est pas parce qu'elles ne se rechargent pas (puisque d'ailleurs elles se rechargent, très lentement, certes, à courant très faible et controlé, et un nombre réduit de fois, mais elles se rechargent bien et durent longtemps une fois chargées ; au boulot on l'a fait avec des alims de labo).
Si on l'interdit c'est parce qu'une fois mises en parallèle il n'y a aucun moyen de contrôler le courant qui va passer de la plus chargée à la moins chargée. Dans les faits, la pile la plus chargée va se décharger dans la moins chargée avec un courant pouvant aller jusqu'à son maximum (appelé courant de court-circuit) qui ne sera plus limité que par la résistance propre à la pile (en pratique très très faible, donc un courant très très fort).
Il en est de même avec les batteries, y compris celles de nos véhicules.
Et il ne suffit pas de mesurer la tension de deux piles ou de deux batteries pour savoir si on peut les mettre en parallèle, car comme certains l'ont déjà constaté, une batterie peut être HS tout en présentant une tension de 12V ou plus, or une batterie HS sur laquelle on force une tension élevée consommera immédiatement un courant plus élevé que la normale.
Ensuite seconde erreur, tu ne considères que le "régime établi" (j'ai un circuit supportant 15V branché sur un circuit délivrant 15V... tout va bien...) sans tenir compte du phénomène transitoire lors du branchement.
Revenons à ce qui peut se passer lorsqu'on branche une batterie de voiture chargée à fond (donc pouvant débiter un courant de pointe de plusieurs centaines d'ampères, je le rappelle) sur une moto dont la tension de batterie sera forcément différente (puisque la voiture a le moteur qui tourne, donc tension entre 13 et 15V et que la moto est à l'arrêt, donc au mieux 12,5V si la batterie est pleinement chargée, ce qui n'est bien évidemment pas le cas sinon on aurait pas sorti ces foutues pinces de démarrage...).
On commence par brancher avec le premier câble la borne + de la batterie de la voiture à la borne + de la batterie de la moto. Rien ne se passe, normal, le circuit est ouvert.
On branche ensuite une pince du second câble sur la borne - de la batterie de la voiture et l'autre pince sur un point non peint du châssis de la moto (une vis par exemple), loin de la batterie... et là, pouf ! une étincelle !
Il vient de se passer un phénomène transitoire dû au branchement ensemble de deux circuits alimentés par deux tensions différentes et présentant des composantes résistives (les câbles, le chassis, le contact des pinces), inductives (les câbles, l'alternateur de la voiture) et capacitives (les batteries). Tout ceci forme un beau circuit RLC, aussi appelé "circuit oscillant" qui sera tout à fait stable en régime établi continu, mais pourra présenter des phénomènes oscillatoires lorsqu'un signal transitoire y sera appliqué (le cas du branchement de la pince sur le châssis), notamment des surtensions (d'où l'arc électrique).
C'est lors de ce phénomène transitoire que des courants importants peuvent apparaître, et comme tout courant, il va chercher à retourner à sa source, en se frayant un chemin par où il pourra, au plus court, et au plus facile (parce que le courant est fainéant, il n'aime pas la difficulté). Ce passage au plus facile, il peut le trouver n'importe où, dans la batterie, dans le boîtier CDI, ou dans tout dispositif branché entre le +12V permanent de la moto et la masse.
Et c'est là qu'il peut faire des dégâts. Parce qu'il peut déclencher un phénomène parasite dans les circuits qu'il traverse, ce que dans mon boulot on appelle un latch up : un chemin de fuite d'un courant déclenche l'ouverture d'un autre chemin qui lui va permettre le passage d'un courant bien plus important, jusqu'à sa destruction.
Alors tu vas me dire que ces phénomènes peuvent se produire aussi avec une batterie de moto. Et bien tout à fait, sauf que les concepteurs des circuits de nos motos ne sont pas cons non plus, ils ont prévu qu'on mettrait une batterie de moto, et qu'ils ont dimensionné leurs circuits (faisceau, switches, multiplexeurs, ECU, capteurs...) et leurs protections pour qu'ils puissent résister à la puissance normalement délivrée par une batterie de moto (soit 12V fois quelques dizaines d'ampères et pendant un temps réduit).
Mais quand tu y branches une batterie de voiture, elle a une capacité bien plus élevée, et peut délivrer un courant en pointe 10 à 20 fois supérieur à celui d'une batterie de moto, et pendant plus longtemps ! C'est ça qui va détruire les protections des circuits (ECU en tête) et une fois les protections HS, le reste du circuit ramasse ses dents.
D'où l'importance de dimensionner correctement la source que l'on va utiliser pour fournir notre tension, et également de bien choisir le point de branchement de la pince sur la masse de la moto : de préférence loin de la batterie et loin de tout circuit électronique sensible de façon à augmenter la résistivité du chemin du courant et limiter son amplitude et celle de la surtension.
Et pour finir, ce n'est pas parce que ton scooter 125 a résisté à ce traitement que tout véhicule ressemblant à ce scooter y résistera aussi. Si un chien ne me mort pas lorsque je lui mets des claques, ça ne veut pas dire qu'il ne me mordra jamais, ni qu'il ne mordra pas mon voisin s'il lui met une claque. Donc on ne conseille pas à autrui d'utiliser des techniques risquées juste parce qu'elles ont marché pour soi.
Tiens, d'ailleurs, je me souviens d'une membre de ce forum ou de celui sur la VFR qui avait tenté de démarrer sa moto en la branchant sur sa 206. La moto a démarré, et marchait, la voiture a calé et n'a plus voulu redémarrer...